Rencontre avec Anne MITHIEUX
Anne MITHIEUX, bonjour, vous êtes sophrologue et enseignante en sophrologie à l’ESSA, installée au Perreux-sur-Marne en Île-de-France depuis 2009.
Dans le cadre de votre pratique, vous accompagnez notamment la douleur chronique depuis 10 ans et en particulier l’endométriose dont vous allez nous parler aujourd’hui.
En effet, merci de me donner la parole sur ce sujet qui me tient très à cœur.
L’endométriose est reconnue comme une maladie chronique. Il s’agit d’une pathologie de l’endomètre, c’est-à-dire de la muqueuse interne de l’utérus.
Dans cette pathologie les cellules de l’endomètre migrent de l’utérus via les trompes de Fallope et colonisent les organes environnants : vessie, ovaires, vagin, rectum, ligament sacro-iliaque, voire même des organes situés plus haut dans certains cas graves.
Anne, combien de femmes sont concernées aujourd’hui par cette pathologie ?
On estime aujourd’hui selon les statistiques les plus récentes qu’une femme sur 10 est atteinte d’endométriose.
Toutefois il s’agit là sans doute d’une sous-estimation. En effet, la médiatisation de cette maladie est assez récente. La première journée de l’endométriose a été organisé en mars de l’année dernière.
Ceci est porteur d’espoir que plus de femmes soient diagnostiquées car actuellement il faut entre 6 et 10 ans pour diagnostiquer la maladie.
On sait effectivement que le diagnostic de l’endométriose peut demander du temps avant d’être posé. Quelles en sont les répercussions pour les femmes concernées ?
La particularité de cette maladie est qu’elle comporte diverses facettes : tout d’abord une dimension de douleur chronique mais aussi de douleur psychique et de difficultés comportementales le cas échéant.
En effet, à la douleur vécue dans la réalité de la femme vient se superposer la douleur de ne pas être reconnue dans cette douleur, et la difficulté à surmonter une certaine incapacité parfois, à accomplir les tâches du quotidien. Elle peut aussi perturber durablement le sommeil.
La période d’errance entre le ressenti des premiers symptômes et le diagnostic de la maladie contribue à créer une douleur majeure, physique et psychique.
Comment s’exprime cette maladie et quelles thérapeutiques sont actuellement proposées ?
Le diagnostic de l’endométriose est souvent réalisé à l’appui d’une IRM, mais quelquefois cette maladie est asymptomatique et s’exprime lors d’un désir d’enfant rendu plus compliqué.
Les symptômes de l’endométriose sont ainsi divers et variés, mais la douleur chronique est majoritairement exprimée par l’ensemble des femmes concernées.
Cette douleur par ailleurs n’est pas calmée autrement que par des antalgiques puissants et/ou une hormonothérapie.
Les médications proposées permettent d’améliorer le soulagement de la douleur. Toutefois, il faut comprendre qu’il y a une véritable usure au fil du temps à être submergée par des vagues de douleur allant de quelques jours dans le mois à des douleurs quasi constantes.
On observe aussi quelquefois des dyspareunies lors des rapports sexuels.
On le comprend donc, dans l’endométriose il est question pour reprendre votre formule, « d’un esprit douloureux dans un corps douloureux ». Est-ce cela qui peut être prise en charge en sophrologie ?
Dans l’accueil le sophrologue écoute activement la façon dont la femme vit son endométriose, car cela touche tellement de facettes possibles : la sexualité, le corps, la façon de vivre le corps, le désir de maternité, la gestion de la douleur…
Il s’agit d’accueillir cette femme qui subit la douleur parfois depuis longtemps pour lui permettre de se sentir à nouveau actrice de sa vie.
Parce que l’empreinte de la douleur est souvent forte et sédimentée depuis longtemps, il va s’agir de la reconnecter à ce qui se passe en elle, c’est-à-dire au corps senti !
Il s’agit bien sûr de faire un état des lieux en accueillant la réalité objective de la personne, mais en renouant aussi avec les autres sensations corporelles non désagréables afin de soutenir la zone qui souffre.
Replacer l’endométriose dans le corps qui vit pour se reconnecter à son intime, à cette intuition intime de « là où je vais » afin de réactiver des projets dans une perspective d’avenir plus apaisée.
Quelle approche, quels protocoles en particulier peuvent être proposés dans l’accompagnement sophrologique ?
Par la détente musculaire, la respiration abdominale et le mouvement fluide du ventre, le sophrologue propose de ramener une mobilité douce et indispensable dans une maladie où le corps est souvent figé, contracté du fait des adhérences.
En accompagnant la gestion de la douleur, on autorise une prise de recul permettant à chaque femme de se réapproprier ses ressources et ses capacités dans sa possibilité à se réconcilier avec ses perspectives d’avenir ! Elle peut alors renouer avec son énergie vitale et s’inscrire dans un nouveau cercle vertueux.
Enfin, il y a une possibilité d’un travail de groupe qui rompt l’isolement et permet de réintégrer une dynamique collective lorsque celle-ci fait défaut.
Anne, je vous remercie pour ce partage très enrichissant qui devrait passionner nos lecteurs !